à suivre...

Sur les pas du commissaire Khuz


Les enquêtes du commissaire Jacques Khuz et de son adjoint Séraphin Dumonde.

Prologue *


Février.
Un matin plutôt frisquet.
Un coin de campagne de France engourdi.
Pourtant, quelques fermes révèlent déjà leur activité par la lumière filtrant au travers de volets disjoints encore fermés.
De l'une d'elles, un homme sort vivement, laissant dans son sillage une traînée de buée, comme les avions que l'on repère à cette ligne opalescente qui semble les poursuivre quand le ciel est d'azur.
L'homme monte dans un vieux break Citroën entre crème et boue qui prend aussitôt le relai, produisant par un autre orifice, artificiel celui-là, la même exhalaison blanchâtre signalant son démarrage.
Il est encore trot tôt pour que les coqs se risquent hors du poulailler, lorsqu'on voit s'allumer les feux du véhicule qui s'ébranle peu après sur le chemin de terre menant à la route. Il s'arrête un bref instant, puis redémarre en tournant à droite comme l'indique le feu orange délavé qui clignote rapidement.
L'auto et son conducteur s'éloignent...
Pas longtemps cependant.
Quelques secondes plus tard, on peut voir ses feux-stop s'allumer, alors qu'une silhouette s'approche de la voiture, semble échanger quelques mots avec le conducteur, puis, faisant le tour par l'avant, monte rapidement côté passager tandis que l'auto redémarre aussitôt, disparaissant dans la campagne blanchie par le givre matinal.
Le jour ne se décidera à se lever qu'une bonne heure plus tard.

Premier tableau


Fin des vacances pour Khuz


Après l'enquête de l'avent, le commissaire principal Jacques Khuz et son adjoint Séraphin Dumonde avaient pu savourer un peu d'un repos bien mérité.
La famille Apludsou, ainsi que l'instigateur de l'affaire, Adrien-Hubert Houseau de la Molletière de Soupolay, étaient sous les verrous. Seul le nain jaune, l'infâme Gustave Orthon, était passé au travers des mailles du filet et courait toujours.*
Séraphin avait pris une dizaine de jours de vacances, et était parti faire du ski dans la banlieue de Vierzon. Il aimait bien skier là bas, car les pentes étaient très douces. Comme il n'était pas très doué, d'une part il ne risquait guère de sorties de pistes et d'autre part il n'avait pas à affronter les quolibets de skieurs chevronnés pouvant s'amuser de son inexpérience.
Khuz, quant à lui, était resté parisien, et en avait profité pour arpenter son quartier en toute décontraction, se promenant nonchalamment dans les rues de ce XVe arrondissement où il aimait à flâner lorsque ses enquêtes lui en laissaient le temps.
Après avoir léché quelques vitrines, la langue et le gosier asséchés, il s'arrêta au café des sports en chambre, afin de savourer un bon petit caldo verde, sa potion magique favorite.
Le patron du bistrot était auvergnat et en cette fin d'après-midi, il affichait un sourire indiquant que la journée avait été profitable.
Alors qu'il était accoudé au comptoir, le téléphone portable de Khuz sonna. Un rapide coup d'œil pour s'apercevoir que c'était un appel de Séraphin. Il n'était pas habituel que son second l'appelle pendant les vacances. Il répondit donc, intrigué.
« Alors, Séraphin, tu t'ennuies ? » Fit Khuz taquin.
À l'autre bout des ondes *, Séraphin semblait soucieux. « Patron, désolé de vous déranger, mais on a un problème ici ! »
« Ah, et que voudrais-tu que je fasse ? » Demanda le commissaire troublé par le ton inquiet de son fidèle assistant.
« Ben, patron, c'est rapport à mon cousin Émile... Il a disparu !! »
« Comment ça, disparu ?... » S'inquiéta Khuz.
« On n'a plus de nouvelles de lui depuis hier matin, patron !...
Il devait se rendre à une réunion d'agriculteurs de la région, et personne ne l'a vu. Il n'est pas arrivé et nous, ne le voyant pas revenir, on s'inquiète !! Qu'est-ce que je peux faire, patron ? »
Séraphin semblait désespéré, aussi Khuz tenta de le rassurer « Mais... vous avez prévenu la gendarmerie ? Cherché dans les hôpitaux ?... »
« Ben oui, patron, mais les gendarmes, ici... et puis rien dans les hôpitaux de la région, aucune trace, aucune nouvelle... je sais plus quoi faire, moi... » Expliqua Séraphin apparemment perdu.
« Bon, il me reste une semaine de vacances, j'arrive... où est-ce que je peux te rejoindre ? » Trancha Khuz.
Séraphin fut soudain soulagé « Ah, patron, merci... vous nous sauvez la vie ! Ben, faut prendre le train jusqu'à Vierzon et là, je viendrais vous chercher en voiture ! Vous avez un train tôt demain matin gare d'Austerlitz à 6 h 45, qui arrive à Vierzon à 8 h 10... ou alors un peu plus tard, si vous voulez patron... » Ajouta-t-il, car prévoyant la réaction de Khuz, il avait anticipé et s'était renseigné sur les horaires.
« Bon, d'accord, je préfère partir de bonne heure. Je prépare une petite valise et tu m'attends demain devant la gare ! Allez, ne t'en fais pas, on va le retrouver ton cousin ! » Fit Khuz pour rassurer son adjoint qui lui paraissait bien affecté.
« Ah, merci patron... à demain, j'y serai ! Bonne fin de journée, merci encore. Je vais prévenir ma cousine et on va vous réserver une chambre... »
Khuz raccrocha. Cette démarche n'était pas officielle, et ça l'embêtait un peu, mais d'un autre côté, il ne pouvait laisser son collaborateur se dépatouiller tout seul sans réagir.
Vierzon ! songea-t-il... Il avait bien été une fois à Vatan pour la fête des lentilles, et il en était revenu en passant par Vierzon, mais sans s'y arrêter.
De mémoire, c'était une région de cultures et assez peu touristique. Enfin, bon... on verrait bien sur place...
6
Le lendemain matin, à 6 h 30 pile, Khuz était sur le quai de la gare. Il avait acheté Paris-Matin, pour avoir un peu de lecture durant le voyage. Une heure et demie, c'était vite passé. Il monta dans une voiture de tête, s'installa confortablement dans le sens de la marche et commença à parcourir son journal.
Dix minutes plus tard, juste avant le départ, un quidam essoufflé vint s'installer en face de lui. Khuz jeta un œil furtif à l'arrivant. C'était un petit bonhomme rondouillard avec un chapeau, rond également, une petite moustache... l'archétype du voyageur de commerce se dit Khuz en reprenant sa lecture.
Mais l'homme ne lui laissa le temps que de lire quelques lignes. Après avoir virevolté debout devant le siège cherchant à placer ses affaires au mieux de son confort personnel, il finit par s'assoir en mettant sa mallette sur ses genoux et s'adressa à lui :
« Bonjour monsieur, excusez-moi, mais... le train s'arrête bien à Vierzon ? » s'inquiéta-t-il, toutefois à voix basse, affichant ainsi une volonté de discrétion, que Khuz considéra cependant comme une intention délibérée de nuire à sa tranquillité.
Ce dernier releva la tête avec une lenteur calculée, nécessaire pensa-t-il, à convaincre son interlocuteur de son besoin de quiétude. « Oui ! D'ailleurs je m'arrête là aussi ! » Fit-il laconique, espérant ainsi renseigner exhaustivement son éphémère compagnon de voyage.
« Ouf... me voilà rassuré ! » Remercia son vis-à-vis, forçant à dessein sur un soupir de soulagement accessoire offert en prime, afin de bien montrer à celui-ci son degré de gratitude, comme si cette aimable révélation l'avait sauvé d'une funeste destinée.
Un coup de sifflet et une brève secousse l'avertissant que le train était parti, il se replongea illico dans sa lecture, plus comme un ultime test destiné à tenter de faire comprendre au bonhomme qu'il ne souhaitait pas davantage engager la conversation, que par intérêt aux articles du journal.
Ceci n'embarrassa nullement l'individu qui considéra pourtant la réponse de Khuz comme une invitation à la conversation. Il reprit donc « Je ne suis pas un habitué de la ligne, ordinairement je fais plutôt la Bretagne ou l'ouest en général... de Dunkerque à Bayonne... Enfin, tout le secteur ouest, le ʺ grand Ouest ʺ, quoi... Mais là, je remplace mon beau-frère... pour une urgence ! »
Il avait judicieusement placé le mot ʺ urgence ʺ, espérant ainsi attiser la curiosité de son vis-à-vis. Celui-ci, peu intéressé par les propos du gros bonhomme lâcha un « ah ! » pour toute réponse, sans presque quitter des yeux sa lecture.
Mais l'autre, obstiné, ne se découragea pas « Figurez-vous... » continua-t-il tout en saisissant le poignet de Khuz pour mieux retenir son attention « ... que Bernard... Bernard, c'est mon beau-frère, a décroché un contrat pour fournir la maison Gallissac !... Gallissac... ceux qui vendent des lunettes pour poules ! »
Là, Khuz comprenant qu'il lui serait impossible de lire tranquillement son Paris-Matin, laissa tomber le journal sur ses genoux et regardant le fâcheux, reprit néanmoins interloqué : « Des lunettes pour poules ? »
Bingo ! La stratégie du “ pied dans la porte ” fonctionnait ! Le voyageur de commerce lâcha le bras du commissaire, et s'inclinant vers lui, se présenta : « Gaspard Blagapard, VRP généraliste. Je vends plutôt des accessoires agricoles ou pour l'élevage en général... de la moissonneuse-batteuse à l'abreuvoir à pigeon... tout ce qui peut être utile aux agriculteurs et même ce qui ne leur sert à rien, du moment que ça peut se vendre ! »
Khuz écoutait, résigné. L'autre continua :
« Alors Bernard a été contacté par Gallissac, qui cherchait un commercial pour démarcher les éleveurs de volaille afin de leur vendre les lunettes qu'ils fabriquent pour les poules. Enfin, les poules, les dindes, les pintades, toute la volaille, quoi ! » Précisa le commis voyageur.
Khuz opinait régulièrement et machinalement du chef, comme ces chiens articulés sur les plages arrière de voitures, qui bougent le cou au rythme des chaos de la route. Mais si la mimique pouvait physiquement donner le change, mentalement son esprit vagabondait déjà sur cette soudaine disparition du cousin Émile.
Pendant que l'ennuyeux personnage gesticulait pour appuyer ses explications ophtalmoavicoles, le commissaire se demandait comment il allait procéder pour commencer son enquête…
Enquête officieuse, pour le moment, donc il ne pourrait se prévaloir de son titre de commissaire divisionnaire, grade auquel il avait été récemment promu suite au succès de sa dernière enquête.
« Eh bien, dites donc ! » Lâcha-t-il à tout hasard tandis que l'autre faisait une pause pour reprendre sa respiration.
Ce dernier reprit ses explications, justifiant le fait que, si les poules étaient réputées ne pas avoir de dents, ce n'était pas une raison pour ignorer les problèmes qu'elles pouvaient rencontrer avec leurs yeux. « Une poule qui voit bien, pond bien ! » Assura-t-il, comme pour convaincre Khuz qui, bien qu'indirectement intéressé par le sort de la volaille en général, restait en l'occurrence assez circonspect sur la pertinence du slogan.
Le calvaire du commissaire ne s'arrêta qu'avec l'arrivée du train en gare de Vierzon. Là, alors que le convoi ralentissait, le type s'arrêta de jacasser pour rassembler ses affaires et se préparer à descendre.
Khuz replia le journal qu'il n'avait pas pu lire, et le glissa dans une poche de sa petite valise à roulettes.
Gaspard Blagapard le salua en le remerciant pour son aimable compagnie. Khuz en fit autant, en vertu du postulat de la réciprocité cordiale édicté par Omer Sibien, prix Nobel de la politesse en 1975, et aperçut par la vitre Séraphin sur le quai qui se hissait sur la pointe des pieds pour tenter de repérer son chef.
Le commissaire, soulagé, sauta sur le quai dès l'arrêt du rapide, et se dirigea vers son adjoint qui l'avait également reconnu parmi les voyageurs arrivants.
Un large sourire éclaira les visages de chacun des deux policiers. L'un étant content de voir arriver l'autre en renfort, et l'autre de quitter la brève, et toutefois pesante, compagnie du vendeur de lunettes pour poules.
« Ça va, patron ? Bon voyage ? » S'enquit Séraphin prévenant.
Khuz répondit par l'affirmative, ne voulant pas digresser inutilement sur les inconvénients de la promiscuité dans les transports en commun. « Très bien ! Mais toi... qu'est-ce qui se passe avec ton cousin Émile ? »
Séraphin prit un air contrit. « Alors, là, patron... mystère et boule de gomme ! On parlera de ça à la maison... »
Séraphin tirait la petite valise à roulettes de son patron tout en se dirigeant vers la voiture. Une vieille 4L des années soixante. Il en souleva le hayon pour y déposer le bagage de Khuz.
« On y va, patron ? » Lança-t-il au commissaire en invitant ce dernier à prendre place dans l'auto.
Et les voilà partis pour le petit village de Vanlébeux, situé à quelques kilomètres au sud-est de Vierzon.

à suivre...                                                                                                                                       

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à suivre 250 pages, 27 chapitres - 27 illustrations

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Avec, par ordre d'apparition au fil des pages :


Le commissaire principal Jacques Khuz, PJ
L'inspecteur Séraphin Dumonde, PJ
M. Gaspard Blagapard, VRP généraliste
Mme Prudence Acharu, cousine de Séraphin
M. Albert Hichon et sa Dame, agriculteurs
M. Richard Etabra, agriculteur
M. Marcel Rirave et sa Dame, agriculteurs
M. Léonce Travôderkhül, travailleur de force retraité
Mme Édith Moitou, secrétaire de la bouse
Brigadier Henri Carsinondeu, gendarmerie de Brolouilles
Commandant Dufont-Kibègne, gendarmerie de Brolouilles
Adjudant Gaston Moulinvatrovit, gendarmerie de Brolouilles
Les gendarmes Aupiez et Surlaipol
Maître Lépouin-Surlézy, huissier de justice
M. Justin Poularout, voisin des Acharu
Mme Yvette, patronne du café-bar  " l'AS Yvette "
Melle Élisabeth Ravasuc, secrétaire de mairie à Vanlébeux
M. Charles Hézienne, alias Jacques Khuz
M. Armand Talaud, alias Séraphin Dumonde
M. Jean Thüb, directeur de la tuladan,
Et sa secrétaire insolente
L'inspecteur Marchalonbre, filatures PJ
M. Émile Acharu, cultivateur à Vanlébeux
Docteur Herman Ithoud, ostéopathie et bouillons divers
La mère Chabraque, alias Irma Rmidhbou, guérisseuse
Monsieur Gaétan Valacru-Chalot, directeur d'Inter-Combine
Firmin, serveur à la cantine d'Inter-Combine
Et, en coulisses :
Melle Claire Delune, secrétaire PJ
M. Edmond-Luc Seydu-Poulay, ministre des ressources potagères
Le sous-lieutenant Régis-Mendel Sambrémeuze, PJ
Raoul Bonde, chercheur d'objets trouvés.

Remercions également la gendarmerie de Brolouilles et la SNCF,
pour leur sympathique, quoique involontaire, collaboration au présent récit.





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